Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Réminiscences-1
Réminiscences-1
Publicité
Archives
31 juillet 2006

Intermède en Germanie

Le militaire a accepté une mutation pour l'Allemagne. Nous sommes donc partis vivre de l'autre côté du Rhin. Tous les matins, un autobus militaire emmène les élèves français de Kehl vers leurs écoles de Strasbourg. Je suis la seule à me faire déposer devant mon école. J'aime ça, ça me donne de l'importance. C'est un peu comme si j'avais un chauffeur personnel. C'est dingue le cinéma qu'on peut se faire quand on a quinze ans.

J'ai beau changer d'école, les résultats scolaires sont franchement mauvais. Marie Curie ne me réussit pas. Et je m'entends de moins en moins avec ma mère.

Je vais souvent me promener sur les berges du Rhin. Cet endroit me fait rêver. Je m'assoie dans l'herbe et je regarde passer les bateaux. Un soir, alors que, songeuse, je regardais une péniche accoster pour la nuit, un garçon est venu s'asseoir à proximité. Longtemps, sans rien dire, nous avons regardé couler les eaux du fleuve. Puis il s'est approché. 

Il était grand et beau. Il était brun et avait des yeux magnifiques.

Beaucoup plus tard, il m'a raccompagnée jusque devant chez moi et avant de me quitter, il m'a embrassée.

J'ai seize ans et c'est mon premier baiser.

Je monte les escaliers, le coeur battant, les joues en feu...

Maman m'attend. Elle m'a vue arriver. Elle m'a vue me faire embrasser...

Ca va barder...

... !!!

Ca a bardé ! Maman était hors d'elle. J'ai pris une telle raclée que j'ai cru qu'elle allait me tuer. Elle m'a traitée de tous les noms : J'étais la pire des trainées, une moins-que-rien, une putain... J'ai eu vraiment très peur lorsqu'elle m'a mis un couteau sous la gorge. Tout ça pour quelques mots échangés avec un garçon, pour un seul et unique baiser.

Le militaire n'a pas bronché. Lorsque maman en eut fini avec sa scène, je suis allée laver mon visage tuméfié et soigner mes bleus.

Le militaire s'est alors approché d'elle pour lui faire remarquer qu'elle aurait pu faire moins de bruit. 

Le lendemain soir, j'ai vu le garçon faire les cent pas devant l'immeuble en lorgnant ma fenêtre. Cachée derrière les rideaux, je le regardais aller et venir.

Je ne me suis pas montrée. Mais je me suis jetée sur mon lit en pleurant.

Pendant des semaines, je n'ai plus adressé la parole à ma mère. Je m'enfermais dans ma chambre pendant des heures pour m'apitoyer sur mon sort et rêver à des jours meilleurs. J'en venais à espérer qu'elle mettrait ses continuelles menaces à exécution, c'est-à-dire me faire enfermer dans une maison de correction. J'enviais secrètement la fille qui habitait en face et dont la maman était gravement malade et sur le point de mourir.

L'année scolaire fut lamentable. Je serai obligée de redoubler ma 3ème.

Et pourtant, j'ai réussi mon Brevet...

Publicité
Publicité
Commentaires
P
VOUS AVEZ VRAIMENT LE TALENT DE CERTAIN ECRIVAIN .SI VOUS DECIDIEZ D EN FAIRE UN LIVRE JE SERAIS LA PREMIERE A L ACHETER .MEME SI JE DEVAIS DORMIR DEVANT LA LIBRAIRIE POUR ETRE LA PREMIERE JE LE FERAIS AVEC PLAISIR .
Publicité